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La Tragédie des Siècles
plus par vingtaines ou par centaines, mais par milliers. Après les
réunions, les églises avaient enregistré un grand nombre de nouveaux
membres ; mais ces néophytes ne tardèrent pas à être eux-mêmes en
butte à l’opposition. Les églises commencèrent à prendre à leur égard
des mesures disciplinaires. Miller adressa alors une lettre ouverte
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aux chrétiens de toutes les confessions, les mettant en demeure, si
ses enseignements étaient erronés, de le lui prouver par les Ecritures.
“Que croyons-nous, disait-il, que nous n’ayons pas tiré direc-
tement de la Parole de Dieu que vous reconnaissez vous-mêmes
comme unique règle de foi et de vie ? Que faisons-nous qui mérite
une si violente condamnation de la part des Eglises et de la presse,
et qui vous autorise à nous exclure de votre communion ? ... Si nous
sommes sur une mauvaise voie, je vous supplie de nous dire en quoi
nous avons tort. Montrez-nous par la Parole de Dieu quelle est notre
erreur. Vous nous avez assez abreuvés de ridicule ; jamais cela ne
nous convaincra que nous faisons fausse route ; seule la Parole de
Dieu pourra changer notre manière de voir, car c’est avec calme
et avec prière, en nous basant sur les saintes Ecritures, que nous
sommes parvenus à nos conclusions
De siècle en siècle, les avertissements du Seigneur ont tous eu
le même sort. Lorsque Dieu eut résolu de faire venir le déluge sur
l’ancien monde, il en avertit les habitants et leur donna l’occasion de
se détourner de leurs péchés. Pendant cent vingt ans, l’avertissement
retentit aux oreilles des pécheurs, les exhortant à se convertir et
à échapper à la colère de Dieu. Mais ce message leur parut un
conte, et nul n’y prit garde. Enhardis dans leur méchanceté, les
antédiluviens se moquèrent du messager de Dieu, ridiculisèrent ses
appels et l’accusèrent même de présomption. Comment un homme
seul osait-il s’opposer à tous les sages de la terre ? Si le message de
Noé était vrai, pourquoi tout le monde ne le recevait-il pas ? Et ils se
refusèrent à croire le message et à chercher un refuge dans l’arche
du salut.
Ces moqueurs prenaient à témoin la nature : la succession inva-
riable des saisons, la voûte azurée qui n’avait jamais laissé tomber
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une goutte de pluie, les prairies verdoyantes fertilisées par les douces
rosées de la nuit. Et après avoir déclaré avec mépris que le prédi-
1. Bliss, ouv. cité, p 250, 252.