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Patriarches et Prophètes
qui se passe, il ne s’attend pas à cet affreux et dégradant spectacle.
Au comble de l’indignation, et pour montrer l’horreur que lui inspire
cette apostasie, il jette les deux tables de pierre, qui se brisent à ses
pieds à la vue de la multitude. Ce geste indiquait que le peuple avait
violé son alliance avec Dieu, et que Dieu, de son côté, répudiait ses
engagements.
Moïse entre dans le camp et, passant au travers de la foule en
liesse, saisit l’idole et la brûle. Puis il la réduit en poudre, jette cette
poudre dans l’eau du torrent qui descend de la montagne, et la fait
boire au peuple pour lui démontrer ainsi l’impuissance totale du dieu
qu’il avait adoré.
Il fait alors appeler son frère coupable et lui demande sévère-
ment : “Que t’a fait ce peuple, pour que tu te soies laissé entraîner à
lui faire commettre un si grand péché ?” Aaron cherche à se discul-
per en racontant les clameurs des Israélites. “Que la colère de mon
seigneur ne s’enflamme pas, dit-il ! Tu sais toi-même combien ce
peuple est prompt à faire le mal. Ils m’ont dit : Fais-nous un dieu
qui marche devant nous ; car ce Moïse, cet homme qui nous a fait
sortir du pays d’Égypte, nous ne savons ce qu’il est devenu. Je leur
ai répondu : Que ceux qui ont de l’or s’en dépouillent ! Ils m’en ont
apporté ; je l’ai jeté au feu, et ce veau en est sorti.”
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Aaron voulait faire croire à Moïse qu’un miracle avait eu lieu,
et que l’or jeté au feu s’était, surnaturellement, transformé en un
veau. Mais ses excuses et ses équivoques ne servirent de rien : il
fut justement considéré comme le plus grand coupable. Le fait qu’il
avait reçu de Dieu des honneurs qui le plaçaient bien au-dessus du
peuple rendait son péché d’autant plus odieux.
C’était Aaron, “le saint de l’Éternel
, qui avait fait l’idole et
publié la fête. Celui qui avait été l’interprète de Moïse, et dont Dieu
avait dit : “Je sais qu’il parlera très bien
, n’avait pas mis le moindre
obstacle au projet sacrilège des idolâtres ; celui par le moyen de qui
Dieu avait frappé de ses jugements les Égyptiens et leurs dieux,
avait écouté sans s’émouvoir cette proclamation faite en présence de
l’image de fonte : “Voilà, ô Israël ! ton dieu qui t’a fait sortir du pays
d’Égypte !” L’homme qui avait accompagné Moïse sur le sommet de
* .
Psaumes 106 :16
* .
Exode 4 :14