L’idolâtrie au Sinaï
281
s’était répandu parmi toutes les nations environnantes, qui redou-
taient ce que Dieu allait faire pour Israël. Si celui-ci avait disparu à
ce moment-là, ses ennemis auraient triomphé, et Dieu eût été désho-
noré. Les Égyptiens auraient déclaré que leurs prévisions étaient
justes. Au lieu de conduire son peuple dans le désert pour y sacrifier,
c’est ce dernier qui était sacrifié. La destruction du peuple que Dieu
avait si hautement honoré eût fait rejaillir sur son nom un opprobre
ineffaçable. Quelle responsabilité encourent ceux que le Seigneur
honore et sur lesquels il compte pour que son nom soit glorifié parmi
les hommes ! Avec quel soin ne doivent-ils pas se garder du péché,
de crainte de s’attirer la colère de Dieu et d’exposer son nom au
mépris des impies !
En intercédant en faveur d’Israël, Moïse sentit sa timidité l’aban-
donner devant l’intérêt et l’amour profonds qu’il portait à ce peuple
pour lequel, sous la direction de Dieu, il s’était tant dévoué. Dieu
exauça ses supplications désintéressées. Il avait voulu mettre à
l’épreuve la fidélité et l’affection de son serviteur pour ce peuple
égaré et ingrat. Et cette épreuve, Moïse l’avait noblement subie. Son
intérêt pour Israël n’avait aucun mobile égoïste. La prospérité du
peuple de Dieu lui était plus chère même que la gloire d’être le père
d’une grande nation. Le Seigneur prit plaisir à voir la simplicité
de cœur et l’abnégation de son serviteur. Il lui confia, comme à un
[294]
fidèle berger, la grande mission de conduire son peuple jusqu’à la
terre promise.
Chargé des “tables du témoignage” et accompagné de Josué,
Moïse redescend de la montagne. Bientôt, ils entendent, montant de
la plaine, des cris et des clameurs qui semblent révéler une calamité
publique. La première pensée de Josué, le guerrier, fut celle d’une
attaque ennemie. “Des cris de bataille retentissent dans le camp !”
s’écrie-t-il. Moïse comprend mieux ce qui se passe. Il ne s’agit pas
de combat, mais d’une joie désordonnée. “Ce n’est ni le bruit de cris
de victoire, dit-il, ni le bruit de cris de défaite ; j’entends un bruit de
chants.”
Arrivés à proximité du camp, ils voient le peuple chanter et dan-
ser autour de son idole. Combien cette saturnale païenne, imitation
des fêtes idolâtres, ressemble peu à la calme solennité des céré-
monies consacrées à l’honneur du vrai Dieu ! Moïse, qui vient de
contempler la gloire de l’Eternel, est consterné. Bien qu’averti de ce