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Patriarches et Prophètes
tenir dignement le sceptre. Sa supériorité intellectuelle le plaçait
au-dessus des grands hommes de tous les siècles. Comme historien,
poète, philosophe, général et législateur, il était sans égal. Et néan-
moins, ayant le monde entier devant lui, il eut la force morale de
renoncer aux perspectives brillantes de la richesse et des grandeurs
humaines, “aimant mieux souffrir avec le peuple de Dieu que d’avoir
du péché une jouissance momentanée”.
Moïse avait appris quelle serait la récompense finale réservée
aux humbles et fidèles serviteurs de Dieu. Pour lui, toute la gloire
mondaine était éclipsée par cette promesse. Le trône et le somptueux
palais des Pharaons lui étaient offerts. Mais il connaissait les péchés
et l’impiété qui régnaient dans ce milieu séducteur. Par-delà les ma-
gnifiques résidences, par-delà la couronne d’un empire, il entrevoyait
la gloire incomparable qui sera le partage des saints du Très-Haut
dans un règne de pureté et d’innocence. Il voyait le diadème impé-
rissable que le Roi du ciel placera sur le front des vainqueurs. Et,
le cœur enflammé de cette foi, il se détourna des grands de la terre
pour se joindre à un peuple pauvre, humble et méprisé qui voulait
obéir à Dieu et non le renier.
Moïse resta à la cour jusqu’à ce qu’il eût atteint l’âge de quarante
ans. La douloureuse servitude qui opprimait son peuple pesait lour-
dement sur son cœur. Il rendait visite à ses frères et les encourageait,
en les assurant que Dieu allait les délivrer. Souvent, révolté à la vue
de l’injustice et de la tyrannie dont ils étaient les victimes, il brûlait
du désir de les venger. Un jour qu’il se promenait, voyant un Égyp-
tien frapper un Israélite, il se jeta sur l’agresseur et le tua. A part
l’Israélite, personne n’ayant été témoin de ce fait, Moïse ensevelit
immédiatement le cadavre sous le sable. Il venait de se montrer prêt
à défendre la cause de son peuple et il espérait le voir se lever comme
un seul homme pour recouvrer sa liberté. “Il croyait que ses frères
comprendraient que Dieu leur accordait par sa main la délivrance ;
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mais ils ne le comprirent pas
” Ils n’étaient pas encore mûrs pour
la liberté. Le jour suivant, Moïse vit deux Hébreux se quereller. L’un
des deux étant évidemment dans son tort, Moïse le censura. Rétor-
quant, le coupable dénia à Moïse le droit d’intervenir et l’accusa
* .
Acts 7 :25