Page 110 - Proph

Basic HTML Version

106
Prophètes et Rois
aurait donné une autre victoire, tout aussi éclatante, en envoyant à
Jézabel un châtiment terrible. L’impression produite alors sur le roi
et sur le peuple aurait opéré une grande réforme.
Elie avait beaucoup espéré du miracle du Carmel. Il avait cru
qu’après cette manifestation de la puissance divine, Jézabel n’aurait
plus d’influence sur l’esprit d’Achab, et qu’une prompte réforme
gagnerait tout Israël. Tout le long du jour, sur le Carmel, il avait
peiné et jeûné. Et cependant, lorsqu’il conduisit le char d’Achab aux
portes de Jizreel, son courage était indomptable en dépit de l’effort
physique fourni pendant la journée.
Mais une réaction, telle qu’il s’en produit fréquemment après
les périodes de foi ardente et de victoires spirituelles, menaçait Elie.
Il redoutait que la réforme commencée sur le Carmel ne fût pas
durable, et le découragement l’envahit. Il s’était élevé sur le sommet
[118]
du Pisga ; maintenant il était redescendu dans la vallée. Animé par
l’inspiration divine, sa foi avait résisté à la plus terrible épreuve ;
mais à cette heure sombre, alors que retentissaient encore à ses
oreilles les menaces de Jézabel et que Satan semblait favoriser le
projet de la reine colérique, le prophète perdit sa confiance en Dieu.
Il avait été élevé au-dessus de toute imagination, et la réaction qui
s’ensuivit fut terrible. Il oublia son Dieu, et il marcha longtemps,
jusqu’à ce qu’il se trouvât dans un lieu solitaire. Harassé de fatigue,
il s’assit sous un genêt, et demanda la mort. “C’est assez, dit-il.
Maintenant, Eternel, prends mon âme, car je ne suis pas meilleur que
mes pères.” Fugitif, solitaire, éloigné de toute agglomération, l’esprit
accablé par un cruel désappointement, Elie ne désirait plus revoir un
visage humain. Brisé de fatigue, il s’endormit profondément.
Dans la vie de tout homme, il est des périodes de profonde
dépression, de découragement total, des jours où la tristesse nous
envahit, et il nous semble impossible de croire que le Seigneur est
encore le bienfaiteur de ses enfants, des jours où les tourments nous
accablent, si bien que la mort nous semble préférable à la vie. C’est
alors que beaucoup perdent leur confiance en Dieu, et sombrent
dans le doute et l’incrédulité. Si, à de tels moments, nous pouvions
discerner la signification des voies de la providence, nous verrions
alors des anges s’efforcer de nous délivrer de nous-mêmes et essayer
d’affermir nos pieds sur un fondement inébranlable, plus solide que