Page 380 - Patriarches et Proph

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Patriarches et Prophètes
possession de Canaan, ils se mirent à réclamer bruyamment les
bienfaits du désert. La première épreuve leur suffit pour laisser
percer l’esprit ingrat et turbulent qu’avaient manifesté leurs pères.
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Ils n’eurent pas plus tôt entendu des voix demander de l’eau, qu’ils
oublièrent la main qui subvenait depuis si longtemps à leurs besoins.
Au lieu de prières adressées à Dieu, on entendit des murmures
désespérés : “Que n’avons-nous péri quand nos frères périrent eux-
mêmes devant l’Éternel
?” En somme, ils regrettaient de n’avoir
pas subi le sort de Coré !
Leur aigreur se déversa contre Moïse et Aaron : “Pourquoi avez-
vous fait venir l’assemblée de l’Éternel dans ce désert pour nous y
laisser mourir, nous et notre bétail ? Pourquoi nous avez-vous fait
quitter l’Égypte pour nous amener dans ce mauvais pays, où l’on ne
peut pas semer, où il n’y a ni figuier ni vigne, ni grenadier, ni eau à
boire ?”
“Alors Moïse et Aaron s’éloignèrent de l’assemblée, et allèrent à
l’entrée de la tente d’assignation. Ils tombèrent le visage contre terre,
et la gloire de l’Éternel leur apparut.” Moïse entendit ces paroles :
“Prends le bâton et convoque l’assemblée, toi et Aaron, ton frère.
Vous parlerez au rocher en présence des Israélites et il donnera ses
eaux ; tu feras sortir pour eux de l’eau du rocher.”
Moïse, le bâton de Dieu à la main, et Aaron se présentèrent
devant la multitude. Tous deux étaient maintenant des vieillards.
Durant de longues années, ils avaient supporté l’insubordination et
l’opiniâtreté d’Israël. A cette heure-là, finalement, la patience de
Moïse l’abandonna. “Écoutez, ô rebelles ! s’écria-t-il. Vous ferons-
nous sortir de l’eau de ce rocher ?” Et au lieu de parler à la paroi
rocailleuse, ainsi que Dieu le lui avait ordonné, il la frappa par deux
fois de son bâton.
L’eau jaillit avec abondance du rocher, et la foule se désaltéra.
Mais une grave faute avait été commise. Moïse avait parlé avec
irritation. Plutôt qu’une sainte indignation causée par l’ingratitude et
le mépris du peuple envers Dieu, le ton de ses paroles avait manifesté
un accès de colère tout humaine. “Écoutez, ô rebelles !” avait-il dit.
L’accusation était fondée, mais la vérité elle-même ne doit pas être
énoncée sous l’impulsion de l’humeur et de l’impatience. Chaque
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Voir
Nombres 20 :1-13