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Patriarches et Prophètes
Satan. Ses sophismes ont beau affirmer le contraire, il est toujours
fatal de désobéir à Dieu.
Le serpent se met à cueillir du fruit défendu et le dépose dans les
mains d’Ève. Elle accepte, comme malgré elle, et alors le tentateur
lui rappelle ses propres paroles : Dieu a défendu d’y
toucher
sous
peine de mort. Ève ne remarque aucun mauvais résultat de son
acte, elle devient plus hardie. Voyant que le fruit de l’arbre est bon à
manger, agréable à la vue, et qu’il est désirable, puisqu’il peut donner
l’intelligence, elle en prend et en mange. Le goût en est excellent.
Elle croit ressentir en elle une force vivifiante, et s’imagine entrer
dans une sphère plus élevée. Et maintenant qu’elle a désobéi, elle
va devenir, entre les mains de Satan, l’instrument de la perte de son
mari. Sous l’empire d’une étrange fascination, elle se rend auprès
d’Adam et lui raconte tout ce qui s’est passé.
Un voile de tristesse mêlée d’étonnement et d’alarme envahit
le visage d’Adam. Il répond à sa femme : Le mystérieux serpent
doit être l’adversaire contre lequel on nous a mis en garde. En
conséquence, d’après la sentence divine, tu devras mourir. Pour
toute réponse, Ève l’engage vivement à manger de ce fruit, en lui
répétant les paroles du serpent : “Vous ne mourrez certainement pas.”
Ce doit être vrai, dit-elle, car je ne ressens aucun signe du déplaisir
de Dieu. Au contraire, j’éprouve une sensation délicieuse, qui anime
tout mon être d’une vie nouvelle, semblable à celle des messagers
célestes.
Adam comprend que sa femme a violé le commandement de
Dieu et foulé aux pieds la seule défense qui leur ait été imposée pour
éprouver leur fidélité et leur amour. Une lutte terrible se livre en
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lui. Il est consterné de voir Ève devenue victime du tentateur. Mais
l’acte fatal est commis, et il va falloir qu’il se sépare de celle dont
la société fait sa joie. Comment s’y résigner ? Oh ! Adam, tu as joui
de la compagnie de Dieu et des anges ; tu as contemplé la gloire du
Créateur, tu sais la haute destinée réservée à ta race si elle demeure
fidèle ! Et tous ces bienfaits, tous ces privilèges s’éclipseraient devant
la crainte de perdre ta compagne ! En effet, son affection pour Ève
prime tout : elle surpasse son amour, sa gratitude et sa fidélité envers
le Créateur. N’est-elle pas, se dit-il, une partie de mon être, et puis-je
supporter la pensée d’en être séparé ? Il ne lui vient pas à l’idée que
la puissance infinie qui l’a tiré de la poudre, qui a fait de lui un être