Page 348 - Patriarches et Proph

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Patriarches et Prophètes
de grand talent, elle avait dirigé, sur le rivage de la mer Rouge, le
chœur et la danse des femmes d’Israël. Elle ne le cédait ainsi, dans
les affections du peuple et dans les honneurs qu’elle avait reçus
de Dieu, qu’à Moïse et à Aaron. Hélas ! le péché qui avait jeté la
discorde dans le ciel surgit aussi dans le cœur de cette fille d’Israël,
et, malheureusement, la sympathie ne lui fit pas défaut.
Marie et Aaron n’avaient pas été consultés dans le choix des
soixante-dix anciens, et ils en conçurent un sentiment de jalousie
contre Moïse. Auparavant déjà, ils avaient craint de voir leur in-
fluence sur ce dernier éclipsée par d’autres. Lors de la visite de Jé-
thro, sacrificateur de Madian et beau-père de Moïse, dont les conseils
avaient été acceptés avec empressement par celui-ci, ils l’avaient
blâmé de méconnaître leur position et leur autorité. Marie et Aaron
n’avaient jamais connu les soucis ni porté les responsabilités qui
pesaient sur leur frère. Mais comme ils avaient été choisis pour le
seconder, ils pensaient que Moïse devait partager avec eux, à titre
égal, les charges de la direction. Ils envisageaient d’ailleurs comme
superflue la nomination d’un plus grand nombre d’assistants.
Pénétré plus que tout autre de l’importance de la grande œuvre
qui lui avait été confiée, Moïse était conscient de sa faiblesse et
faisait de Dieu son conseiller. Aaron avait une plus haute opinion
de lui-même et possédait moins de confiance en Dieu. Au Sinaï,
en acquiesçant docilement aux désirs du peuple, il avait démontré
la faiblesse de son caractère et trahi la confiance placée en lui.
Aveuglés par la jalousie et l’ambition, Marie et Aaron oublièrent
tout cela. Hautement honoré par le choix de sa famille au saint
office de la prêtrise, ce dernier y puisait en ce moment-là un aliment
pour son ambition. “Est-ce par Moïse seul que l’Éternel a parlé ?”
demandèrent le frère et la sœur. “N’a-t-il pas aussi parlé par nous
?”
Ils se considéraient comme favorisés de Dieu dans la même mesure
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que Moïse, et ils estimaient avoir droit aux mêmes prérogatives.
Cédant à son mécontentement, Marie critiqua des événements
que Dieu avait tout spécialement dirigés. Le mariage de Moïse lui
avait déplu. Le fait qu’il avait pris une femme en dehors du peuple
d’Israël lui paraissait une injure faite à sa famille et blessait son
* .
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