Page 284 - Patriarches et Proph

Basic HTML Version

280
Patriarches et Prophètes
s’est prosterné devant lui.” Dieu aurait pu étouffer ce mouvement
à sa naissance ; mais il le laissa se développer pour nous montrer
comment il punit la trahison et l’apostasie.
Le contrat de Dieu avec son peuple était rompu. En conséquence,
l’Éternel dit à Moïse : “Laisse-moi donc agir maintenant ; mon cour-
roux s’enflammera contre lui, et je le consumerai ; mais je ferai de
toi une grande nation.” On pouvait prévoir que le peuple hébreu,
mais surtout l’élément étranger, enclin à se rebeller contre Dieu,
continuerait de murmurer contre Moïse et de le tourmenter par son
incrédulité et son opiniâtreté. Pour ce dernier, la tâche de conduire
ce peuple jusqu’à la terre promise allait être ingrate et surhumaine.
Du reste, ses péchés l’avaient déjà privé de la faveur de Dieu, et la
justice demandait son élimination. En conséquence, l’Éternel propo-
sait à Moïse de le faire disparaître et de susciter, par lui, une grande
nation qui remplacerait Israël.
“Laisse-moi donc agir maintenant, disait la voix, et je le consu-
merai.” Qui n’eût pas abandonné ces pécheurs à leur sort ? Qui, à
la place de Moïse, ne se serait pas empressé d’échanger une vie
d’ennuis, de tracas et de sacrifices payée d’ingratitude et de récrimi-
nations, contre une carrière aisée et honorable ?
Mais là où d’autres n’auraient aperçu que des causes de décou-
ragement, Moïse voyait des motifs d’espérance. Dans cette parole :
“Laisse-moi donc agir, maintenant”, il discerna que Dieu, loin de lui
[293]
interdire d’intercéder, l’y encourageait plutôt ; il sentit même que
seule son intercession pouvait sauver Israël, et que s’il l’en conjurait,
Dieu épargnerait son peuple. Plein de cet espoir, “Moïse chercha
à apaiser l’Éternel, son Dieu, en disant : Pourquoi, ô Éternel, ton
courroux s’enflammerait-il contre ton peuple, que tu as fait sortir du
pays d’Égypte grâce à ta force souveraine et à ta main puissante ?”
Par cette parole : “Ce peuple que
tu as
fais sortir d’Égypte”,
Dieu montrait qu’il avait renié Israël. Moïse, déclinant humblement
l’honneur qui lui est fait, réplique en appelant Israël “
ton peuple
, que
tu as
fait sortir... grâce à ta force souveraine”. Il continue : “Il ne faut
pas que les Égyptiens puissent dire : C’est pour leur malheur qu’il
les a fait sortir de notre pays, pour les faire périr dans les montagnes
et les exterminer de la surface de la terre !”
Au cours des quelques mois qui s’étaient écoulés depuis qu’Is-
raël avait quitté l’Égypte, le bruit de sa merveilleuse délivrance