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Patriarches et Prophètes
ou son équivalent. Les pères de famille ne jugeaient pas prudent de
confier le bonheur de leurs filles à des hommes qui n’avaient pas fait
d’économies en vue de l’entretien d’une famille. Si ceux-ci n’étaient
pas assez économes et travailleurs pour acquérir du bétail ou des
terres, il était à craindre que leur vie ne fût misérable. Un moyen
de mettre à l’épreuve un prétendant qui n’avait pas de quoi fournir
de garantie consistait à lui permettre de travailler pour le père de
la personne aimée durant une période correspondant à la valeur de
la dot exigée. Si l’on était satisfait de ses services et si, à d’autres
égards, le prétendant était trouvé digne d’entrer dans la famille, il
obtenait la femme de son choix et la dot versée faisait généralement
retour à l’épouse le jour de son mariage. Dans le cas de Rachel et de
Léa, Laban retint égoïstement par devers lui la dot qui devait leur
être restituée. C’est à cela qu’elles feront allusion lorsqu’elles diront,
plus tard, en quittant la Mésopotamie : “Il nous a vendues, et il a
même dilapidé notre argent
”
Cette ancienne coutume, si elle provoquait parfois des abus,
était sage. Tout en prévenant des mariages prématurés, elle don-
nait l’occasion d’éprouver les affections du futur gendre, comme
aussi son aptitude à entretenir une famille. La coutume opposée qui
règne de nos jours engendre de fâcheuses conséquences. Il arrive
fréquemment que les candidats au mariage ont très peu d’occasions
de faire réciproquement connaissance de leurs habitudes et de leurs
dispositions, de sorte qu’au jour des noces, en ce qui concerne la vie
quotidienne, ils sont vraiment étrangers l’un à l’autre. Dans un grand
nombre de cas, on découvre, mais trop tard, qu’on n’est pas faits l’un
pour l’autre, et ces unions ont pour résultat une vie malheureuse.
Il arrive aussi fréquemment que l’épouse et les enfants souffrent
de l’indolence et de l’incapacité ou même des habitudes vicieuses
du mari et père. Si le prétendant avait été mis à l’épreuve, selon
l’ancienne coutume, de grands chagrins auraient pu être évités.
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Les sept années de fidèles services rendus par Jacob pour obtenir
la main de Rachel “ne lui semblèrent que quelques jours, parce qu’il
l’aimait
. Au terme de cette période, l’égoïste et cupide Laban,
qui désirait conserver un aussi précieux collaborateur, le suborna
* .
Genèse 31 :15
* .
Genèse 29 :20