124
Patriarches et Prophètes
Et maintenant que les derniers gages d’amour ont été échangés,
que les dernières larmes ont coulé et qu’une dernière fois ils se
sont embrassés, le père lève le couteau qui doit égorger son fils...
Mais son bras reste paralysé : du ciel, une voix lui crie : “Abraham!
Abraham!” Il répond promptement : “Me voici !” Et la voix de
l’ange continue : “Ne porte pas la main sur l’enfant, et ne lui fais
aucun mal. Je sais maintenant que tu crains Dieu, puisque tu n’as
pas refusé ton fils, ton fils unique
”
Alors Abraham aperçoit “derrière lui un bélier qui est retenu
dans un buisson par les cornes”, et sans perdre un instant, “il l’offre
en holocauste à la place de son fils”. Dans sa joie et sa gratitude,
il donne un nouveau nom à ce lieu désormais sacré :
Jéhovah-Jiré
,
Dieu pourvoira.
Sur le mont Morija, Dieu renouvelle l’alliance faite avec Abra-
ham et, par un serment solennel, confirme la promesse destinée à ses
descendants à travers toutes les générations : “Je l’ai juré par moi-
même, déclare l’Éternel, puisque tu as agi ainsi et que tu ne m’as
pas refusé ton fils, ton fils unique, je te bénirai certainement. Oui,
je te donnerai une postérité nombreuse comme les étoiles du ciel et
comme le sable qui est au bord de la mer ; et ta postérité tiendra les
portes de ses ennemis. Toutes les nations de la terre seront bénies en
ta postérité, parce que tu as obéi à ma voix
”
L’acte de foi dont Abraham vient de donner l’exemple est comme
une colonne de feu illuminant le sentier des serviteurs de Dieu
jusqu’aux derniers siècles. Durant trois journées de voyage, il avait
eu suffisamment de temps pour réfléchir et pour douter, s’il y avait
été disposé. Il aurait pu facilement se dire qu’en tuant son fils il
allait être considéré comme un meurtrier, comme un second Caïn ;
qu’il serait méprisé, mis au ban de la société, et que c’en serait
fini de tous ses enseignements et de sa mission au milieu de ses
contemporains. Il aurait pu, également, prétexter son grand âge. Mais
[132]
le patriarche n’a pas cherché de prétextes pour refuser d’obéir à Dieu.
Il ne s’est réfugié derrière aucun de ces subterfuges. Humain et sujet
aux mêmes faiblesses, aux mêmes penchants que nous, il ne s’est
pas demandé comment la promesse divine pourrait se concilier avec
* .
Genèse 22 :11-18
* .
Genèse 22 :11-18