Chapiter 35 — Les visées de la papauté
            
            
              L’attitude des protestants envers l’Eglise de Rome est infiniment
            
            
              plus favorable aujourd’hui qu’autrefois. Dans les pays où le catho-
            
            
              licisme est en minorité, et où il se fait conciliant pour étendre son
            
            
              influence, l’indifférence est de plus en plus grande à l’égard des
            
            
              doctrines qui le séparent des églises réformées. On en vient même à
            
            
              penser qu’en définitive les divergences sur les questions vitales ne
            
            
              sont pas aussi considérables qu’on l’avait supposé, et que certaines
            
            
              concessions de la part du protestantisme permettraient une entente
            
            
              avec la hiérarchie. Il fut un temps où les protestants attachaient une
            
            
              grande valeur à la liberté de conscience acquise à grand prix. Ils
            
            
              inculquaient à leurs enfants l’idée que la recherche d’un accord avec
            
            
              Rome équivalait à une infidélité à l’égard de Dieu. Combien les
            
            
              choses ont changé !
            
            
              Les défenseurs de Rome prétendent que leur Eglise a été ca-
            
            
              lomniée, et le monde protestant est enclin à les croire. Plusieurs
            
            
              déclarent qu’il est injuste de tenir l’Eglise d’aujourd’hui responsable
            
            
              [612]
            
            
              des abominations et des absurdités qui ont souillé son règne pendant
            
            
              les siècles d’ignorance et de ténèbres. Ils attribuent sa cruauté à la
            
            
              barbarie des temps, et affirment que sous l’influence de la civilisation
            
            
              moderne elle a changé de sentiments.
            
            
              On oublie la prétention à l’infaillibilité maintenue par la hiérar-
            
            
              chie au cours de huit siècles, prétention qui, loin d’être abandonnée,
            
            
              a été proclamée au dix-neuvième siècle avec plus d’éclat que jamais.
            
            
              Comment la curie romaine pourrait-elle renoncer aux principes qui
            
            
              l’ont régie au cours des siècles passés puisque, à l’en croire, l’Eglise
            
            
              n’a “
            
            
              jamais erré
            
            
              ” et que, selon les Ecritures, elle “n’errera jamais
            
            
            
            
               ?
            
            
              Jamais l’Eglise n’abandonnera sa prétention à l’infaillibilité.
            
            
              Tout ce qu’elle a fait contre ceux qui refusaient d’accepter ses
            
            
              dogmes, elle le considère comme légitime. N’agirait-elle pas de
            
            
              même si l’occasion s’en présentait ? Que viennent à tomber les res-
            
            
              trictions qui lui sont actuellement imposées par les gouvernements ;
            
            
              1. Mosheim,
            
            
              Eccl. Hist.
            
            
              , liv. III, 2e p., ch. II, par. 9, note 1.
            
            
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