David fugitif
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La nouvelle en parvint à Saül, qui attendait impatiemment d’avoir
David en son pouvoir. Au lieu de se sentir repris dans sa conscience,
exaspéré, il envoya d’autres émissaires. Ceux-ci, également saisis
par l’Esprit de Dieu, se joignirent aux premiers et se mirent aussi à
prophétiser. Un troisième contingent fut à peine arrivé que l’Esprit
prophétique le saisit. La fureur de Saül ne connut plus de bornes et
il se décida à se rendre lui-même sur les lieux, impatient d’exécuter
son ennemi en l’égorgeant de sa propre main. C’est alors qu’un ange
de Dieu le rencontra et prit possession de son être. Subjugué par
l’Esprit, le roi continua son chemin en adressant à Dieu des prières
mélangées de prédictions et de mélodies sacrées.
Arrivé à Rama, à la maison du prophète, il enleva le vêtement
extérieur qui trahissait son rang et passa tout le jour et toute la nuit
sous l’influence de l’Esprit de Dieu avec Samuel et ses disciples. Le
bruit de cette scène se répandit au loin, et les gens s’attroupèrent
pour la contempler. Une fois encore, et à la fin de son règne, on
put répéter ce proverbe en Israël : “Saül est aussi du nombre des
prophètes !” Le roi assura David qu’il n’avait rien contre lui. Mais
celui-ci se défiait des paroles du roi et de sa conversion. Il n’attendit
pas que son humeur changeât : il s’échappa.
Il réussit à revoir son ami Jonathan et il eut une entrevue avec
lui. Conscient de son innocence, il lui adressa cette touchante la-
mentation : “Qu’ai-je fait, quel est mon crime ? De quoi me suis-je
rendu coupable envers ton père, pour qu’il en veuille à ma vie ?”
Persuadé que les sentiments de son père avaient changé, Jonathan
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répondit : “A Dieu ne plaise ! tu ne mourras point. Mon père ne
forme aucun projet, important ou non, sans m’en informer. Pourquoi
donc mon père me cacherait-il celui-ci ? Cela n’est pas possible.”
Après la récente manifestation de la puissance de Dieu, Jonathan
ne pouvait croire que le roi pût faire du mal à David. Mais peu
convaincu, celui-ci répondit à son ami : “Aussi vrai que l’Éternel est
vivant et que ton âme est vivante, il n’y a qu’un pas entre moi et la
mort.”
Au temps de la nouvelle lune, on célébrait une fête solennelle
qui devait tomber le lendemain de l’entrevue. Il était de rigueur, à
cette occasion, de voir les deux jeunes gens à la table du roi. Comme
David craignait d’y aller, il fut convenu qu’il rendrait visite à ses
frères à Bethléhem, ce qui représentait une absence de trois jours.