Page 135 - Patriarches et Proph

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La destruction de Sodome
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En conduisant ses invités par un chemin détourné, il avait espéré
cacher son intention aux oisifs qui erraient près de la porte de la
ville. Mais son insistance et l’hésitation des voyageurs les avaient
fait remarquer. Aussi, avant qu’ils se fussent retirés pour la nuit,
une foule désordonnée entourait la maison. Cette multitude était
composée de jeunes gens et de vieillards, tous également enflammés
par les plus viles passions. Les deux étrangers venaient de s’informer
auprès de Lot au sujet des mœurs de cette ville et celui-ci achevait de
les avertir de ne pas s’aventurer hors de la maison, quand on entendit
les huées et les ricanements de la populace demandant à Lot de les
lui livrer.
Sachant que si ces forcenés sont poussés à bout, ils pénétreront
dans sa maison, Lot sort dans la rue pour essayer de les persuader.
Dans l’espoir de les calmer et de leur faire honte de leur abominable
intention, il leur dit, employant l’appellation de “frères” dans le
sens de voisins : “Je vous en prie, mes frères, ne leur faites point
de mal.” Mais ces paroles ont l’effet de l’huile sur le feu. La rage
des assaillants devient semblable au rugissement de la tempête.
Menaçant de traiter Lot pis que ses hôtes, ils se mettent à le narguer
et à lui demander s’il est là “pour faire le juge”. Se précipitant sur
lui, ils l’eussent écharpé, sans l’intervention des deux anges. “Les
deux visiteurs étendirent la main ; ils firent rentrer Lot avec eux dans
la maison, et ils fermèrent la porte.”
Ce qui suit nous fait connaître qui étaient les personnages qu’il
avait pris sous son toit. “Ils frappèrent d’éblouissement les gens qui
étaient à l’entrée de la maison, depuis le plus petit jusqu’au plus
grand ; aussi ces derniers s’efforcèrent-ils en vain de trouver la porte
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d’entrée.” Sans ce double aveuglement, cette infâme populace eût
déjà connu les coups de la justice de Dieu. Cette scène n’était pas
nouvelle, mais l’iniquité était arrivée à son comble, et les habitants de
Sodome venaient de franchir la frontière mystérieuse où la patience
de Dieu arrive à son terme. Dans la vallée de Siddim, les feux de sa
colère étaient près de s’allumer.
Les anges révèlent alors à Lot l’objet de leur mission : “Nous
allons, lui disent-ils, détruire cette contrée, parce qu’un grand cri
s’est élevé contre ses habitants devant l’Éternel, et l’Éternel nous
a envoyés pour la détruire.” Ces étrangers que Lot avait voulu pro-
téger, ce sont eux maintenant qui lui offrent de le sauver, lui et