Page 46 - Premiers Ecrits (1970)

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Premiers Ecrits
je fis signe qu’on m’apportât une ardoise, et j’écrivis que j’étais
devenue muette. J’écrivis aussi ce que j’avais vu et je demandai une
grande Bible. J’y cherchai rapidement tous les textes que j’avais lus
sur la carte. Je fus incapable de parler pendant toute la journée. De
bonne heure le lendemain matin, mon âme était remplie de joie ; ma
langue était déliée et je louai Dieu à haute voix. Je n’osai donc plus
douter, ou résister, ne serait-ce qu’un instant, à la puissance de Dieu,
quoi que l’on puisse penser de moi.
En 1846, tandis que j’étais à Fairhaven, ma sœur (qui à ce
moment-là m’accompagnait habituellement), sœur A., frère G. en
moi-même partîmes en bateau à voile pour visiter une famille à
West’s Island. La nuit tombait quand nous nous embarquâmes. Nous
n’étions pas plutôt partis qu’un orage éclata soudainement. Il tonnait,
les éclairs sillonnaient le ciel, et la pluie tombait à torrents. Si Dieu
ne venait pas à notre secours, il était évident que nous étions perdus.
Je m’agenouillai dans le bateau, et je suppliai le Seigneur de
nous délivrer. Et alors que nous étions secoués par les vagues en
furie et que l’eau passait sur le pont, je fus ravie en vision. Je vis
que tout l’océan sécherait plutôt que de nous faire périr, car mon
œuvre venait à peine de commencer. Ma vision terminée, toutes
mes craintes étaient dissipées ; nous nous mîmes à chanter et à
louer le Seigneur. Notre petit bateau n’était plus qu’un Béthel flot-
tant. Le rédacteur de l’
Advent Herald
avait écrit que mes visions
étaient connues comme étant des “manifestations du mesmérisme”.
Je demandai alors comment de telles manifestations auraient pu se
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produire à cette occasion. Frère G. était plus qu’occupé à diriger
le bateau. Il avait jeté l’ancre, mais elle ne s’était pas fixée. Notre
embarcation était secouée par les vagues et chassée par le vent ; il
faisait si obscur qu’on n’aurait pas pu voir d’un bout à l’autre du ba-
teau. Mais bientôt l’ancre s’accrocha, et frère G. appela au secours.
Il n’y avait que deux maisons sur l’île, et nous étions tout près de
l’une d’elles, mais ce n’était pas celle où nous voulions aller. Toute
la famille où nous nous rendions dormait, sauf une petite fille qui,
providentiellement, avait entendu notre appel. Son père accourut
bientôt à notre secours, et nous fit monter dans une petite barque
pour atteindre la rive. Nous passâmes la plus grande partie de la nuit
à louer Dieu et à le remercier pour sa merveilleuse bonté à notre
égard.