Le procès de Césarée
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L’apôtre parlait avec une véhémence et une sincérité si mani-
festes que ses paroles avaient un pouvoir de persuasion extraordi-
naire. Dans sa lettre à Félix, Claude Lysias avait témoigné de la
même manière en faveur de Paul. De plus, Félix lui-même connais-
sait mieux qu’on ne pouvait le supposer la religion hébraïque.
La déclaration si claire de l’apôtre, à propos des événements
qui le concernaient, permit à Félix de comprendre plus facilement
les motifs qui avaient poussé les Juifs à l’accuser de sédition et de
trahison. Or, le gouverneur ne voulait pas accorder aux accusateurs
la condamnation injustifiée d’un citoyen romain. Il ne voulait pas
non plus le leur livrer pour qu’ils le mettent à mort, sans l’avoir jugé
légalement. Mais en réalité, en agissant ainsi, Félix ne faisait que
satisfaire son intérêt personnel ; il désirait acquérir des louanges et
de l’avancement. De crainte d’offenser les Juifs, il se garda de rendre
justice à un homme qu’il savait innocent. C’est pourquoi il décida
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d’ajourner le procès jusqu’à l’arrivée de Lysias, et il dit : “Quand le
tribun Lysias sera venu, j’examinerai votre affaire.”
L’apôtre demeurait donc captif, mais Félix ordonna au centenier
qui le gardait de “lui laisser une certaine liberté” et de n’empêcher
“aucun des siens de lui rendre des services”.
A quelque temps de là, Félix et sa femme, Drusille, firent com-
paraître Paul pour l’interroger en particulier “sur la foi en Christ”.
Ils éprouvaient le vif désir de connaître la nouvelle doctrine — cette
doctrine qu’ils n’auraient peut-être plus l’occasion d’entendre expo-
ser, et qui les accuserait au jour du jugement, s’ils s’obstinaient à la
rejeter.
Paul considéra cette occasion comme provoquée par Dieu et fit
tout pour l’exploiter. Il savait qu’il se trouvait en présence de celui
qui avait tout pouvoir pour le mettre à mort ou pour le libérer, et
pourtant il n’adressa pas à Félix et à Drusille des louanges ou des
flatteries. Ses paroles, il en était sûr, leur apporteraient une odeur
de vie ou de mort. Mettant de côté toute considération personnelle,
l’apôtre chercha à faire naître en eux le sentiment du danger qu’ils
couraient.
Paul se rendait compte que l’Evangile avait des droits sur tous
ceux qui l’écoutaient, et qu’un jour Félix et Drusille seraient, ou
parmi les purs et les saints autour du grand trône blanc, ou parmi
ceux à qui le Seigneur dira : “Retirez-vous de moi, vous qui com-